vendredi 13 février 2009

L'enfant circoncision-friendly




Il y a une chose qui m'était interdite dès la naissance, le genre d'interdiction qui ne se brave pas : être monsieur tout le monde.

Tout petit garçon, au milieu d'autres morveux de mon âge pour qui le terme de "métis" n'évoquait rien, je réalisais qu'il ne serait à priori pas facile pour moi de me fondre dans la masse. A l'époque, vraiment, ce terme ne voulait rien dire pour un gosse.. D'ailleurs pour être honnête, même dans cette foutue chanson de Julien Clerc, au départ, je n'avais pas capté la subtile dédicace. Ca sonnait plus comme une formule rigolote qu'autre chose, pour moi, genre "tassétissatomitessabisse", quelque chose comme ça, alors pour les autres..

Tu dégustes ton quatre heures dans la cour de récré, tranquille comme un grabataire, puis l'instant qui suit te fait comprendre qu'en fait, la légère différence de couleur entre ta paume et l'extérieur de ta main, ça ne vient pas du caramel de ton RAIDER. "Pas gravissime, te dis-tu d'abord, les gens aiment ça, le caramel !", mais tu finis par percuter : si ça t'intrigue, ça intriguera forcément les autres.

Par chance, les années 90 se sont pointées. Avec elles, débarquaient Yannick et sa Saga Africa et un tas de neo-hippies ravies de porter des boubous et de les enlever devant le zizi d'un Mamadou. L'âge d'or du métissage, une période durant laquelle je comprenais peu à peu qu'un jour, peut-être, mes enfants iront prendre place à coté de ce débile de gamin blond sur les paquets Kinder. (Ca, ça s'appelait déjà comme ça.) (Sans déconner, il a vraiment l'air con, ce gamin)

Et puis il m'a fallu grandir, parcourir du monde et comprendre ce qui se passait mal dans le mien. Etre métis, c'était joli ici, mais seulement si j'évitais d'être trop con. Devenir un métis digne de ce qu'il porte en lui de mixité culturelle, c'était ça, l'objectif. M'instruire sans devenir méprisant, conserver les racines sans devenir sectaire ; c'eût été trop stupide de devenir un Doc Gyneco, et bien trop dommage de finir dealer, le cul cloué à un banc en banlieue. Et ça use, de faire attention à ne pas trop pencher d'un coté ou de l'autre.

Avoir été métis durant les deux dernières décennies, c'était un peu ça : une perpétuelle recherche du "juste milieu".

Tout à l'heure, je buvais un verre avec de vieux amis lorsque l'une d'eux m'a complètement bloqué en me demandant pourquoi je n'obéissais à aucun "schéma conventionnel d'appartenance à une catégorie de personnes". J'ai la verve aiguisée en temps normal, mais je n'ai pas su quoi répondre, et ce n'était pas seulement parce que j'avais du mal à comprendre ce qu'elle venait de dire..

Après y avoir pensé toute la nuit, je crois que ça ne vient pas de ma nature elle-même, mais de tout ce dont j'ai conscience la concernant, ça conditionne un peu ma façon d'être. Etre particulier, dans les années 80 comme aujourd'hui - à fortiori aujourd'hui -, c'est toujours une affaire de précautions.

samedi 7 février 2009

L'homme qui pissait sur les cyclones


Il est un art auquel nous, hommes abandonnés par leurs bien-aimées pour une quinzaine sur une île paradisiaque, nous adonnons lorsque de pareilles circonstances s'installent.

Le célibatisme, sorte de célibat épuré de toute éventuelle relation sexuelle*, amoureuse ou même sentimentale, quelle qu'elle soit, puisque nous avons tendance à culpabiliser lorsque nous nous rapprochons de certaines amies en l'absence de LA dame.

Le célibatisme, c'est donc boire. Boire chez ses amis, tant et si bien que toute conversation valable devient impossible et qu'on se contente de passer ce qu'on appellera par la suite, non sans hypocrisie bienséante, "de bons moments". Le célibatisme se caractérise dans un groupe d'amis par quelques expressions du milieu : "Wouah ! T'étais vraiment imbibé, ce soir-là !" ; "Sérieux ?! Tu t'souviens pas ?!" et autres "Je crois qu'on devrait se voir un peu moins dorénavant". Le genre de choses que l'on dit à toute personne suffisamment bourrée pour converser avec elle-même, lorsqu'on a tissé avec elle des liens d'amitié, en somme.

Au milieu de son célibatisme, on peut s'interroger, se demander si cette consommation d'alcools, de drogues et ces blagues lancées à tout-va ne cachent pas une peur de réaliser que la personne aimée et absente ne nous manque pas tellement, finalement. La relation amoureuse deviendrait alors moins importante et le terme "amour" beaucoup moins légitime.

Mais comme la psychologie, c'est pour les parisiennes et les pédés, j'ai préféré me servir un nouveau verre lorsque je suis arrivé à cette étape. Et en fait, Mme Mama me manque pour de bon.

Je constate ainsi qu'un week-end durant lequel on se sent trop fatigué pour retourner boire, trop seul pour faire l'amour après une grasse mat' et trop malin pour regarder TF1, ça donne envie de bloguer.

* Je suis pertinemment conscient que pour certains, le célibat simple fonctionne également ainsi, je faisais juste semblant.